21 juin 2009

Chronique 8

La journée calvaire touchait à sa fin ... J’étais fourbue, le moral au plus bas ... Préparer la tambouille pour une cinquantaine de gaillard à l’estomac aussi gros qu’une panse d’ogre ça ne vous laisse pas une minute de repos ! Je commençais à éprouver une sorte d’affection pour la vieille, son sale caractère avait de quoi s’alimenter, nous nourrir tous les jours, c’était pas des plus folichon ...

Quand j’ai quitté les cuisines, minuit s’était fait la belle depuis longtemps ... Je suis rentrée sous ma tente ou Ecce-Deus dormait comme un loir bien qu’il soit plus proche d’un minou et me suis écroulée sur une chaise. Allez, retranscrire des batailles et entraînements entre deux sacs de pommes de terre à éplucher... Perso j’y suis pas arrivée. J’allais donc devoir passer la nuit à gratter du papier pour rattraper mon retard. J’ai fouillé dans le foutoir qui me servait de mémoire ... Pas facile d’y voir clair ... depuis l’annonce du retour de Borgom, le vieux était monté sur ressorts, il ne laissait pas une minute de répit aux gars. On avait tué plus de monstres ces derniers jours qu’en trois mois... Je décidais de commencer par l’expédition dans la vallée des vents-hurleurs...

C’était un jeudi matin il me semble, Hastur voulait tester une nouvelle hache qu’il avait payé une fortune. Yavait intérêt à ce que l’arme soit à la hauteur du prix sinon le forgeron qui l’avait fabriquée allait bouffer ses ronds.
Comme à son habitude il s’est flanqué devant moi et m’a dit :

« Je pars pour la vallée des montagnes de Seng en famille, reste de la place on te prend avec nous si t’es ok ? »
« Heu vous croyez qu’on a une chance de s’en sortir là-bas ? Parait qu’les monstres sont cotons. »

Il m’a fait son regard paternaliste...

« Ma ptite faut qu’tu passes à la vitesse supérieure, les rats et les farfadets c’est sympa un moment mais c’est pas ça qui va t’aider à améliorer ta technique de combat. Si tu trembles devant un ogre ca va donner quoi devant l’dragon ? »
« Bah à vrai dire si je pouvais éviter de croiser Borgom ça m’arrangerait... »
« Bordel mais qu’est que j’ai fait pour être entouré de trouillards et de poivrots ! »
« Vous énervez pas chef. »
« J’m’énerve pas ! T’as dix minutes pour rassembler ton attirail et nous rejoindre devant la porte nord ! Fin d’la discussion ! »

En plus de sa femme et de ses nièces, Hastur avait invité une jeune archer du nom d’Heliad et le lutteur Kricket à se joindre à l’expédition. Sept en tout...
Avec la plus grande diplomatie je suggérai :

« Reste une place on pourrait prendre un toubib avec nous, au cas où y’ait des blessures à soigner ? »
« Sont tous occupé aujourd’hui, on fera sans. » M’a rétorqué le chef.
« Une escouade est constituée de huit membres, ai-je insisté, j’dois pouvoir nous dégoter quelqu’un qui roupille encore ... »
« T’étais la dernière, laisse tomber, on fera avec. Et arrête de flipper comme une gamine ! »

Se rendre dans la vallée des vents-hurleurs est en soit un danger. Une fois arrivée au Village des montagnards, faut compter plusieurs heures pour atteindre l’endroit et croyez-moi c’est pas d’la rigolade. Le chemin grouille d’orcs qui vous attaquent si vous passez trop près de leur campement. Or entre les bestioles d’Eternia qui pouvaient pas s’empêcher d’aller renifler à droite à gauche et la jeune Crâ qui quittait le sentier constamment pour aller cueillir des fleurs, on se faisait agresser tous les cent mètres. Et si encore y’avait eut qu’ça... Mais Kricket était déchaîné, une sorte d'hystérie jouyeuse l'animait à la perspective de combattre des ogres. Il ne marchait pas, il courait.
Tsss, j’vous assure ya pas plus masochiste qu’un lutteur ! A se balader tout le temps avec son marteau pour demander qu’on le cogne ! C’est limite flippant...

« Hey, Eriaka, tu veux bien m’écraser les doigts avec le marteau ? C’est plus marrant quand c’est quelqu’un d’autre. S’il-te-plaît, frappe-moi, allez frappe-moi ! La douleur ça m’rend plus fort ! Vas-y, soit pas timide ! Un bon coup sur les doigts, t’inquiète, ils vont pas s’briser ! »
« Dans tes rêves ! »
« Ha ! Madame, c’est comme ça qu’il nomme Eternia, ça serait possible d’emprunter votre oléphont, histoire qu’il m’marche dessus ? Ou alors votre dragounné, pour me faire roussir les poils, ça doit faire mal ça ! Ho je sais ! Encore mieux ! J’suis génial écoutez ça ! L’oléphon m’écrabouille pendant que le drago utilise mes os pour faire un feu de camp ! On pourrait y ajouter les anguouilles avec leurs éclairs ! Raaaaaa après ça je serai prêt à tuer Borgom d’une main !!!! »
« Mais quelle horreur ! Jamais de la vie ! »
« Heu chef, chef ! Vous pouvez tester votre nouvelle hache sur moi ? Soyez sympa, un grand coup sur le crâne ! Si ça pisse le sang c’est encore mieux ! Allez, faites pas vot’ Rat Bajoie... »

Hastur ne s’est même pas donné la peine de répondre, il l’a juste regardé et dans son silence résonnait une phrase du genre
« C’est un ticket sans escale pour le camp que tu vas recevoir si tu continues ! »
Kricket a fait mine de se diriger vers les muses qui rigolaient comme deux midinettes...

« Pas touche ! » A gueulé le chef.

Au final il s’est rabattu sur la jeune archer et ça a faillit marcher !

« Hey ma poule, ça te dirait d’utiliser mon torse comme cible pour t’entraîner au tir ? J’suis même ok pour qu’on dessine les cercles avec le bull au centre, les chiffes et tout le tintouin... »
« Mais vous allez mourir si on fait ça ! »
« Naaaan j’suis increvable ! C’est sans risque j’tassure ! Au contraire, tu verras... Une goutte de sang versée est remplacée par dix grammes de muscle, c’est un truc de ouf j’te l’accorde mais c’est la vérité ! »
« Bah, j’sais pas moi ... le chef est d’accord ? »
« Mais oui, t’inquiète, entre le chef et moi ca roule ! On est des potes pas b’soin d’paroles on s’comprend. Hey ma ptite si tu me boost à fond j’serai ok pour te porter jusqu'à la vallée ... T’en dis quoi ? T’es pas mariée je crois ? »

Héliad est devenue tellement rouge qu’on aurait pu confondre son minois avec une grosse tomate mure à point.

Heureusement pour la gamine, le chef n’avait rien perdu de leur échange ... Il a posé sa main sur l’épaule du lutteur et lui a suggéré avec une pointe de menace qui se voulait audible :
« Alors mon POTE, si on partait en éclaireur toi et moi, histoire de dégager le terrain pour ces dames ? Bah alors t’as perdu ta langue ? Remarque, on s’comprend tous les deux, pas besoin de parler ! »

L’après-midi était bien entamé lorsque nous avons atteint l’entrée de la vallée. L’endroit était lugubre, je ne sais pas pourquoi on appelait ça une vallée, ça ressemblait plus à un canyon formé par les eaux de l’apocalypse, avec ses grandes falaises grises et son sol aride.

« Parfait, faisons un peu connaissance avec les habitants du coin. » a déclaré le chef en soupesant sa hache.
Un groupe composé d’ogres et d’orcs, leurs serviteurs sans doute, se chamaillaient un peu plus loin l’énorme carcasse d’un chamodinde. Ils ne nous avaient pas repérés ... Ca semblait jouable. Au signal du chef nous avons déboulé sur eux avec la rage et la fougue de combattants aguerris. La chance était de notre coté, le terrain nous permettait de démarrer en formation serrée. J’ai enveloppé mes équipiers de toutes mes protections. Eternia a sorti de sa sacoche son dragounné et Héliad a lancé des flèches à tout va pour ralentir la progression de nos ennemis. Le vieux, toujours aussi pragmatique, à posé son coffre derrière un rocher, pas fou le loustic il comptait bien le remplir de poils, peaux et autre babioles. Le combat a durée une petite heure, les deux muses s’amusaient comme des folles, elles riaient bêtement à chaque coup qu’elles donnaient. Quand à Kricket ... que dire... cette bataille aurait pu être dans mes souvenirs un doux reflet de perfection si le lutteur n’avait pas passé tout le combat à gueuler « FRAPPEZ-MOI ! FRAPPEZ-MOI ! »

Les batailles suivantes ont été tout aussi fructueuses, tous ont mordu la poussière. Nous étions heureux, l’entraînement acharné imposé par le chef portait ses fruits, même un vieil ogre qui dépassait les 80 tonnes à trouvait la mort, non sans difficulté je l’admets.

A l’attention de l’éventuel lecteur pour qui la race des ogres est un mystère, j’adjoins à cette anale la définition faite par le Manuel du guerrier redouté.
« L’ogre, malgré sont apparence anthropomorphe n’a aucune parenté avec l’homme. Il se nourrit en moyenne vingt à trente fois par jour, essentiellement de viandes et de racines. Il grossir de cent kilos environ chaque année, donc plus la bête est imposante plus elle est vieille. Il dépasse rarement les 100 tonnes, car à ce stade de sa croissance, ses organes ont tendances à exploser sous le poids qu’ils soutiennent. L’on peu donc considérer que l’ogre a une vie relativement courte n’excédant pas les 10 ans.»

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